| | | ISSC | Institut Suisse de Sexologie Clinique |
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14 avril 2015 : Comment retrouver le mode d'emploi après une abstinence de plus ou moins longue durée ?
Voici le résumé de notre discussion et des riches échanges entre hommes et femmes présents en grand nombre à ce café :
- L'abstinence dans un couple est un motif de consultation que l'on rencontre fréquemment dans nos cabinets de sexologues, au bout d'un laps de temps de quelques mois à quelques années. Ce que nous observons, c'est que plus l'abstinence dure longtemps et plus il est difficile d'aider le couple à se retrouver dans l'intimité et à remettre les choses en route. C'est comme si on avait perdu le mode d'emploi ... Un couple prend l'habitude de vivre sans sexe, au-delà des tensions et frustrations que cela peut engendrer chez l'un ou l'autre ou les deux partenaires. Plusieurs personnes témoignent avoir vécu ainsi pendant de nombreuses années, se laissant prendre dans le cercle vicieux de la routine et de la monotonie. Dans ces conditions, on a tendance à se dévaloriser de plus en plus et à se replier sur soi-même. On interprète tous les signes négatifs contre soi. On ne se sent plus ni sexy ni désirable. On doute de soi et on n'ose plus prendre aucune initiative.
- Les causes que nous retrouvons à l'origine de l'abstinence sont multiples et variées : arrivée des enfants, grossesse, post-partum, contraception hormonale, ménopause, pénétration douloureuse, dépression, angoisses, maladie grave (cancer) ou handicapante, séquelles post accident ou arthrose, dorsalgies, lassitude, routine, prise de poids, complexes physiques, maigreur... Ces conditions peuvent rapprocher le couple et le rendre plus solidaire et uni dans le quotidien, tout en l'éloignant sur le plan physique. Le manque de tendresse et de câlins est ressenti comme souvent plus douloureux que le manque de relations sexuelles.
- Les célibataires abstinents peuvent être asexuels, en situation de digérer une rupture amoureuse ou un divorce vécu comme un échec relationnel (combien de temps faut-il rester abstinent-e après une séparation ?), homosexuels cachés et non assumés, appréciant le confort de la vertu, dans la peur de s'engager et de souffrir, dans la dissociation entre sexe et sentiments (échangisme, sex-friends, sites de rencontre internet...). Les hommes se mettent souvent la barre très haut quand ils font une nouvelle rencontre quand ils veulent séduire, plaire et satisfaire leur nouvelle partenaire, ce qui peut singulièrement leur compliquer la tâche. La sexualité semble être plus importante et jouer un rôle identitaire plus fort pour la gent masculine que féminine.
- Les couples qui nous consultent bénéficient de la présence d'un tiers extérieur qui facilite la parole et la communication autour de difficultés qui font beaucoup souffrir et peuvent engendrer de fortes émotions (tristesse, colère, jalousie...) et qui peut les aider à débloquer une situation où ni l'un ni l'autre n'ose plus prendre aucune initiative pour s'approcher, ce qui fait penser à l'autre que le désir s'est éteint. La peur de reprendre des relations sexuelles, du rapprochement, de se déshabiller, de se montrer, d'entrer dans l'intimité de l'autre, la peur du refus sont de nombreux freins qui entraînent une perte de confiance en soi, une baisse de l'image de soi, l'aggravation de complexes physiques déjà présents auparavant, la fermeture, le repli sur soi, l'évitement... Il n'est pas si facile de sortir de cette situation de blocage une fois qu'elle s'est installée dans un couple. Encore faut-il avoir envie d'avoir envie... et apprendre à s'accepter et à s'aimer comme on est !
- Les femmes sont plutôt inhibées par leur éducation (familiale, sociale, religieuse), les hommes par les standards pornographiques (montrant des femmes avides et entreprenantes). Chaque société édicte des normes et impose ses normes en matière de comportement et de différences de rôles masculins/féminins qui changent et évoluent avec le temps et selon les époques. Nous vivons dans une société qui transmet une forte injonction sexuelle et dans laquelle on se sent coupable de ne pas avoir de désir (qu'on imagine toujours plus actif et présent chez ses voisins...). Nos grands-mères se forçaient pour effectuer le " devoir conjugal ", nos mères ont connu la " libération sexuelle ", nos filles sont dans le refus et le repli face aux demandes trop X ... Mais les vieilles dames démentes sont très demandeuses et désinhibées sexuellement
- Les demandes verbales sont-elles plus explicites que les approches physiques ? Toucher le sexe de l'autre ? Se montrer nu-e, faire un strip-tease ? Renouveler les scénarios sexuels et se montrer plus créatifs et ludiques ? La tendresse, les caresses, les massages sont une façon de réapprivoiser son corps et celui de l'autre. Certains ont recours aux professionnelles du sexe. D'autres font du sport pour se réapproprier leur corps et leurs sensations. Certaines prennent un amant pour tenter de relancer leur sexualité conjugale (ce qui ne marche pas toujours ...). Se retrouver dans les bras d'un nouvel homme peut réveiller soudainement et rapidement un désir qui avait disparu depuis longtemps grâce au contact peau à peau, aux baisers et aux étreintes si on est prêt-e à se laisser apprivoiser !
- Un participant propose de créer un groupe ASA pour les Abstinents Sexuels Anonymes
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